La
philosophie de Michel Bordage sur le rapport esprit-matière
De la non-vie
vint la vie ; de la matière morte naquît l'esprit.
Avec la vie apparut la perception : la perception de la beauté
et de la laideur, de la sérénité et de la peur.
La vie est la façon dont l'univers se perçoit lui-même
; l'esprit est la puissance de la perception.
Tandis que
la vie croissait, évoluait et devenait plus complexe, c'est
alors qu'apparut l'intelligence, et avec elle, la faculté
de comprendre. Les êtres intelligents que nous sommes interrogèrent
l'univers et, quand ils furent assez adroits pour formuler leur
question, l'univers leur répondit. Le lien invisible entre
la matière et l'esprit devint plus puissant, en même
temps que la connaissance universelle devenaît plus profonde.
La nature même
de ce lien est cependant mystérieuse et subtile, et il est
plus facile de comprendre la nature de la matière et de l'énergie.
L'être humain a développé une technologie en
exploitant les lois de la physique, mais elle manque de fondements
mystiques. Il a aussi élaboré des cultures évoluées,
froides et cruelles ; insensibles qu'elles sont au battement du
cur de la réalité.
L'artiste est
cet être qui étudie ce lien entre la matière
et l'esprit. C'est donc bien lui qui entreprend de marcher sur la
voie de l'harmonie universelle. Il se rend compte qu'au delà
de ce que semble être les trois ordres de réalité
du monde - matière, vie et esprit -, il existe des êtres
illuminés capables de jouer avec la simple matière
brute et de l'éduquer. Ces êtres illuminés,
dont il fait partie, créent à leur tour la vie en
modelant la matière brute à l'image de ses émotions
et de ses passions.
C'est ainsi
que l'artiste, esprit qui ressent ce lien entre lui et le reste
de l'univers, recrée la cellule originelle, base de la vie.
La vie est
la façon dont l'être humain se perçoit lui-même.
L'art est la puissance de sa perception.
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